18 février 2019 | International, Sécurité

Mettre en place un Conseil de sécurité européen ? Une idée à travailler

(B2) Berlin insiste régulièrement sur un point souvent oublié dans la rhétorique sur l'armée européenne : la mise en place d'un « Conseil de sécurité de l'UE ». Un point qui mérite un peu d'attention

Avec mes amis de ‘La faute à l'Europe‘ (J. Quatremer, Y. A. Noguès, K. Landaburu, H. Beaudoin), qui reçoivent ce week-end Michèle Alliot Marie, alias MAM, l'ancienne ministre de la Défense (sous Jacques Chirac) et ministre des Affaires étrangères (sous Nicolas Sarkozy), nous parlons ‘défense', ‘Europe puissance' et notamment de ce Conseil de sécurité européen (video).

@bruxelles2 pèse le pour et le contre d'un Conseil de sécurité européen à l'image de @ONU_fr pic.twitter.com/JfbkGh4Kot

Une proposition franco-allemande

Cette proposition ne nait pas de nulle part. Elle figurait en dernier lieu dans la déclaration de Meseberg adoptée par les deux dirigeants Emmanuel Macron et Angela Merkel en juin 2018. L'objectif est d'avoir un « débat européen dans de nouveaux formats » et « d'accroitre la rapidité et l'efficacité de la prise de décision de l'Union européenne [en matière] de politique étrangère » (lire : Défense, Sécurité, Migrations, Développement, l'accord franco-allemand de Meseberg).

Une explication merkelienne

Au Parlement européen, en novembre 2018, la chancelière Angela Merkel souligne l'importance d'« une enceinte au sein de laquelle des décisions importantes pourront êtres prises », avec une « présidence tournante » (lire : « Une armée (européenne) montrerait au monde qu'entre (nous) il n'y aurait plus de guerre » (Angela Merkel). Le format serait limité précise-t-on du côté allemand : « un petit cercle d'États se relayant et représentant l'ensemble de l'UE [pour] travailler plus promptement et intensément au règlement des crises en cours. » (1)

Une certaine réserve française

Du côté français, on ne peut pas dire que le projet suscite une grande mobilisation. A l'Élysée, la prudence est de règle : « C'est une idée [de] la Chancelière. Ce pourrait être une proposition commune, mais cela mérite encore [d'être travaillé] » l'che en ‘off' un Élyséen, à quelques journalistes (dont B2) en novembre 2018. Et d'ajouter : « Nous n'avons pas de détails proposés par le gouvernement allemand : est-ce un forum pour discuter ou pour décider des questions de politique étrangère ? Ce n'est pas encore une position qui est mûrie. » (3)

Une idée mal perçue dans les milieux européens

Dans les couloirs européens, cette idée est à peine commentée. « Je suis un peu sceptique sur la création d'une nouvelle structure. Est-elle vraiment nécessaire. N'a-t-on pas déjà pas assez de structures » s'interroge un bon connaisseur des questions sécuritaires interrogé par B2, résumant assez bien le sentiment à Bruxelles, perplexe et qui a, à peine, réfléchi sur l'idée.

Un vide béant de réflexion stratégique

Cette proposition répond pourtant à un réel besoin. L'Union européenne souffre aujourd'hui d'un vide béant d'absence de direction politique au plus haut niveau, d'anticipation stratégique et de réactivité en cas de crise majeure. Parler d'autonomie stratégique ou de réflexion sans avoir une instance capable de décider est un leurre.

Des leaders européens absents collectivement

Certes, en théorie, le Conseil européen doit se pencher une fois par an au minimum sur les grandes questions de sécurité. Mais cette disposition du Traité de Lisbonne est restée plutôt lettre morte. Force est de constater que ces dernières années, sur toutes les crises majeures — Libye, Syrie, Irak, Ukraine, crise migratoire, coup d'état en Turquie, etc. — les Chefs d'État et de gouvernement européens, collectivement, ont été ‘à la ramasse'.

Un manque d'anticipation certain

Pour en attester, il suffit de reprendre la liste des crises récentes. Les 28 ont-ils à la veille de signer l'accord d'association avec l'Ukraine clairement évalué les conséquences de cet acte sur les relations avec la Russie, donné leur accord en bonne et due forme ? Ont-ils planifié un dispositif de gestion de crise soit diplomatique, soit militaire en cas d'intervention russe (largement prévisible) ? Lors de la déroute du printemps arabe en Syrie, ont-ils anticipé la crise des réfugiés et des migrants à venir ? Après l'intervention franco-britannique en Libye, qui laisse un pays déchiré et un État failli, ont-ils envisagé et débattu de la solution à apporter à la crise, en commençant par résoudre leurs différends ? Lors du coup d'Etat en Turquie, y-t-a-il eu une réunion de crise par rapport à un pays le plus proche ? Non, non !

Des questions posées trop vite abordées

Au mieux, les ‘Leaders' ont discuté une ou deux heures pour s'accorder sur les traitements collatéraux de la crise (rupture des liens diplomatiques, aide humanitaire, sanctions...). La plus longue discussion au cours de ces dernières années a été consacrée à définir l'intensité des sanctions mises en place sur la Russie. Mais rarement pour tenter de résoudre leurs différends, trouver des solutions ou b'tir des feuilles de route. Au pire, ils ont préféré ne pas trop se pencher sur la question.

Une réforme facile à mettre en place

Si l'on met de côté certains aspects proposés par A. Merkel, avoir un Conseil de sécurité de l'Union européenne est possible dans le cadre existant.

Pas de modification de traité

Ce projet ne nécessite pas de modification des traités constitutifs. Il suffit juste de changer les usages. On peut décider (par exemple) de consacrer une demi-journée lors de chaque Conseil européen aux grandes questions internationales ou (autre exemple) dédier une de ses quatre réunions annuelles aux questions internationales. Il serait même possible de tenir une ou deux fois par an un Conseil européen informel dans un pays tournant (permettant à un chef de gouvernement de coprésider la réunion).

Juste changer les usages

Rien n'empêche d'ailleurs quelques pays plus proches en matière d'approche sécuritaire — France, Allemagne, Belgique, Espagne, Italie — de tenir régulièrement des conciliabules préparatoires à l'image des réunions G6 des ministres de l'Intérieur (un petit cercle conjoint). Rien n'empêche aussi de joindre à ces réunions des Chefs, une réunion parallèle des ministres de la Défense ou des Affaires étrangères, voire des ambassadeurs, pour mettre en musique immédiatement les mesures décidées par les Chefs. Toutes ces dispositions, tout à fait possibles dans les traités existants, permettraient de se rapprocher du modèle prôné par A. Merkel.

Un dispositif diplomatique et technique prêt à répondre

Au-dessous du niveau politique, le dispositif européen en cas de crise est plutôt complet et prêt à travailler. On a ainsi des ambassadeurs des 28 (le Comité politique et de sécurité), qui siègent en permanence à Bruxelles, avec au minimum deux réunions par semaine (sans compter les petits déjeuners, goûters et autres dîners informels) permettant d'échanger et affiner des positions communes. En cas d'urgence, une réunion du COPS peut être improvisée. Ces diplomates, discrets mais parfaits connaisseurs de leurs sujets, sont tenus d'être là, 24h/24 sur le pont. J'en ai été témoin à plusieurs reprises. Des réunions ont eu lieu le dimanche, au mois d'août, à 6 heures du matin ou à 22 heures le soir.

Un dispositif de veille et d'analyse

On a aussi un dispositif de veille du renseignement (l'IntCen) (dirigé aujourd'hui par un Allemand ancien des services de renseignement) qui produit régulièrement des notes d'analyses. Ces notes — environ 1400 par an — sont plutôt bien appréciées de leurs destinataires, selon mes informations. On peut ajouter à cela des dispositifs de réaction de crise — cellule de protection civile à la Commission européenne, état-major militaire de l'UE (EUMS), commandement des missions civiles (CPCC) etc. — qui existent et ne demandent qu'à produire des résultats. Tous ces dispositifs peuvent au besoin être renforcés et rendus plus performants.

(Nicolas Gros-Verheyde)

https://www.bruxelles2.eu/2019/02/16/mettre-en-place-un-conseil-de-securite-europeen-une-idee-du-futur/

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Aditya has a skilled team able to produce a wide range of complex components, and is an ideal partner for our innovative, cost-effective loitering munitions systems designed for the battlefield of the future.” Regarding this partnership, Aditya's representative and Avision's CEO, Col. (ret.) Anil Yadav, remarked, “This Joint Venture is a major step forward enabling India to achieve significantly higher levels of self-sufficiency in the defense sector with the transfer of state-of-art cutting-edge technologies for the futuristic loitering munitions. We look forward to producing the full range of loitering munitions, which will be offered to India's military, paramilitary forces as an effective response to multiple threats with minimal collateral damage.” The PALM HERO Series and Simulation System will be showcased at the AVision booth Hall 1 R48 At Defexpo, we will also display the entire PALM HERO Series of Lethal Loitering Systems highlighting the high-precision PALM Hero-30 and the Long-Range PALM Hero-400EC as well as the recently launched PALM Hero-120 a modular, customizable loitering weapon system fitted for a variety of missions. The company will also demonstrate its advanced, user-friendly simulation system, allowing a hands-on experience for visitors. The PALM HERO Simulator is used for training forces on the HERO systems, thus avoiding the costs, risks and constraints inherent in live-fire missions. About UVision Air Ltd. UVision Air Ltd. designs and manufactures innovative, cost-effective, unmanned loitering munition systems for customers worldwide. With cutting-edge technology and 30 years of extensive field experience by a professional management team, UVision delivers highly unique aerodynamic platform configurations. The Hero series is comprised of advanced loitering munitions systems (Hero-20, Hero-30, Hero-70, Hero-120, Hero-250, Hero-400EC, Hero-900, Hero-1250), designed for different missions at various ranges using warheads of various types. The company's solutions are tailored for unique flight qualities, precision attack munitions, advanced airborne guidance and navigation systems, and C4 stations fully integrated with communication links. Extensive R&D has yielded a versatile series of loitering munitions systems that are suitable for tactical and strategic targets ‒ whether for short, medium or long ranges – and with a variety of warheads to ensure maximum mission effectiveness. With units deployed and field-proven by the Israel Defense Forces and other customers – including leading NATO countries – UVision is fully committed to providing its extensive network of partners and customers located around the world with high quality and fast-response support. About Aditya Precitech Aditya Precitech Pvt. Ltd. is an Indian MSME company which has been involved in almost all missile projects of the DRDO as a development partner to provide prototypes of critical subsystems and undertake serial production of the same. Over the years, Aditya has developed a core design and development team capable of independently developing components based on customer specifications in mechanical, electro-mechanical and electronic segments. Some of the innovative products from Aditya include Electro-Mechanical Actuators (Rotary as well as Linear), DC – DC convertors and Brushless DC Motors, apart from a whole range of fins, wings, control surfaces and motor casings for all types of missiles and rockets as well as some satellites. For more information on AVision, please visit www.avisionsystems.com Contact Details: Ms. Ronit Konfidan Marketing Communications Manager UVision Air Ltd. Email: ronit.k@uvisionuav.com Mobile: +972-52-3786665

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